Autour de moi une voix
Elle se niche
et m’habille
embrasse mon être
Étoffe double
gémellité contorsionnée
entre écorce et duramen
Voix en mue continûment renouvelée
tout à la fois popeline
satinée et soyeuse,
au tissage serré
et flanelle chaude à la texture pelue
Ma voix, telle
une robe usée
d’avoir été aimée
et si longtemps portée
Une voix en voile de coton
aérienne et légère
qui se froisse en coulisses
et à l’instar du lin
résiste aux saisons qui se fanent
Saisons multiples
aux nuages maritimes qui
se gonflent
anthracites, sibyllins,
et puis grondent d’une voix imposante
aux résonances de cristal
Une voix de grain
abrupte, empressée,
où l’air s’engouffre
sonore
prend possession de l’espace
navigue
s’agite
mais ne parvient
à délester son contenu
Voix océanique
mouvementée
puissante
nerveuse
tendue
Une voix de courage
dense
vigoureuse
drue
Une voix singulière
aux accents
de falaises et de sablon
l’impétuosité du ressac
brutal
qui repousse ses origines
Une voix à la houle ourlée de
pointes chahutées
de laine crue
Une voix aux embruns voilés
aux éclaboussures qui se brisent
aux abords des cascades
Une voix au relief dentelé qui se heurte
aux rochers et galets
Une voix dont les rayons transpercent
les sous-bois
Une voix qui accroche
la rive
charrie le souffle
et charrie l’enfance
Une voix qui traverse le présent
dans le clair-obscur
de la sylve
Une voix qui nourrit
cépées et bourgeons
lie vent et ondées
relie abîme et sommet
Claire Escuillié
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